Près de 20 000 enfants ont été enlevés en Ukraine depuis l’invasion russe. Alors que des pourparlers de paix émergent, notre regard doit revenir sur ces enfants et sur les violations flagrantes de leurs droits.
Réflexions sur « Après la pluie : les enfants volés de Poutine rentrent à la maison », un film de Sarah McCarthy
Le mois dernier, j’ai regardé « Après la pluie : les enfants volés de Poutine rentrent à la maison », un documentaire réalisé par Sarah McCarthy sur les enfants ukrainiens enlevés en Russie et ramenés par leurs parents ou grands-parents. Ce film émouvant montre comment ces enfants et leurs parents ont suivi en Estonie un programme visant à panser, au moins dans une certaine mesure, les blessures causées par leur séjour forcé en Russie. Les enfants et leurs parents ont passé dix jours dans une retraite boisée, proche de la mer. Ils ont eu des conversations entre eux, assistés par des psychologues, les chiens et les chevaux jouant également un rôle dans la thérapie. Petit à petit, les parents ont baissé leur garde et les enfants ont commencé à parler de leurs expériences dans les orphelinats et les familles d’accueil en Russie, loin de leurs parents qui craignaient pour leur bien-être.
En tant que spectateur, vous suivez de près les expériences de Veronica (14 ans) et de sa grand-mère Vera, ainsi que celles de Sasha (7 ans) avec son père Yvgeny et son frère et sa sœur aînés. A la fin du séjour, il est demandé aux parents et aux enfants de mettre dans une petite boîte un objet qui leur est cher. Sasha se demande comment elle peut faire entrer sa famille dans la boîte – après tout, ils sont son bien le plus précieux.
Le film raconte le processus de guérison que traversent les enfants et leurs parents. On ne voit presque rien de ce qui est arrivé aux enfants en Russie, mais le film laisse néanmoins une impression bouleversante. J’ai été particulièrement frappé par la résilience des enfants et de leurs parents, l’humanité et la compassion des animateurs, ainsi que la présence silencieuse et fidèle des animaux. Mais on ressent constamment les blessures profondes infligées aux enfants par leur enlèvement et leur séjour dans des institutions russes, loin des parents et de la famille. Ce sont des blessures visibles – exprimées par Veronica qui semblait se rapprocher un peu plus de ses sentiments en montant à cheval. En fin de compte, cependant, elle se retrouve avec « un vide profond ».
La réalisatrice du film, Sarah McCarthy, aux côtés des producteurs, des familles et des conseillers, attire l’attention sur les près de 20 000 enfants enlevés en Ukraine depuis l’invasion russe de février 2022. Elle estime que ces enfants et leurs familles ont reçu trop peu d’attention et devraient être fait partie des négociations de paix, surtout maintenant que le président élu des États-Unis, Donald Trump, a annoncé des pourparlers de paix entre la Fédération de Russie et l’Ukraine.
En effet, nous devons parler davantage de ces enfants. Sur près de 20 000 enfants, seulement un peu plus de 1 000 sont revenus. Tous les autres enfants se trouvent toujours en Russie ou dans les territoires ukrainiens occupés par la Russie. Il n’existe aucune idée précise du lieu où se trouvent ces enfants ni de leur bien-être. Ce qui est clair, c’est que les enfants et leurs familles sont victimes de violations flagrantes du droit international.
Un peu plus d’un an après l’invasion de l’Ukraine, la Cour pénale internationale a émis des mandats d’arrêt contre le président Vladimir Poutine et la médiatrice russe pour les enfants, Maria Lvova-Belova, spécifiquement pour le transfert et l’enlèvement illégaux d’enfants d’Ukraine vers la Russie, un crime de guerre. Plus tôt cette année, le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies s’est adressé à la Fédération de Russie au sujet de l’enlèvement d’enfants ukrainiens et a appelé les autorités russes à restituer les enfants et à mettre fin à la violation flagrante de leurs droits et libertés. En effet, divers droits humains des enfants, tels que protégés par la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, sont affectés par cette ingérence illégale de la Russie dans la vie des familles ukrainiennes. Ceux-ci incluent le droit de ne pas être séparé de ses parents, le droit de retrouver ses parents, le droit de conserver son identité et sa nationalité et le droit de ne pas être soumis à une privation illégale de liberté et à un traitement cruel, inhumain ou dégradant.
Mais dernièrement, notre attention s’est détournée de l’Ukraine pour se concentrer davantage sur d’autres régions du monde, notamment le Moyen-Orient. Et bien sûr, de nombreux autres conflits requièrent notre attention, et certains d’entre eux se déroulent dans le plus total anonymat. Dans tous ces conflits, ce sont souvent les enfants et les familles qui souffrent le plus. Ce film montre cependant que la Russie utilise l’enlèvement d’enfants comme arme de guerre et que cela provoque d’énormes dégâts, avec un impact durable sur les enfants et les familles à travers les générations. Une injustice sans précédent se produit en Ukraine et en Russie, et nous devons y prêter attention.
J’appelle donc le gouvernement néerlandais à remettre cette question à l’agenda politique international, européen et national. En même temps, nous devons tout mettre en œuvre pour soutenir les institutions, les organisations de la société civile et les bénévoles qui travaillent sans relâche pour réunir ces enfants et leurs parents et les aider à accepter leurs souffrances. Nous devons également contribuer à rassembler des preuves contre les autorités russes afin que les responsables soient finalement tenus pour responsables. Nous le devons simplement à tous les enfants volés.
Une version plus courte de ce blog a été publiée en néerlandais sous forme d’éditorial dans le journal néerlandais Trouw.[LT(1] .
Photographie : Copyright © 2024 « Après la pluie : les enfants volés de Poutine rentrent à la maison » de Sarah McCarthy (publié avec autorisation).
[LT(1]Lien de facture. J’ai regardé celui-ci la semaine dernière.